Des prédictions en béton
Confinement du réacteur, tours de refroidissement, piscines Au Lirmm, on s’y attelle avec l’intelligence artificielle.d’entreposage de combustible usé… dans une centrale nucléaire, le béton est omniprésent. Et soumis à de nombreuses contraintes : radiologiques, thermiques, chimiques, hydriques et mécaniques. Pour prédire l’étanchéité de ces installations, Yann Monerie, chercheur au laboratoire de mécanique et génie civil, fait appel à l’intelligence artificielle.
Plus de 20 millions de tonnes de béton sont produites en France chaque année, pour construire des immeubles, des barrages, des ponts ou encore… des centrales nucléaires. Une installation à haut risque où ce mélange de sable, de ciment, de gravier et d’eau agit comme une barrière de confinement. Mais comment savoir si cette enceinte va rester étanche avec le temps ? « L’étanchéité du béton est déterminée par la manière dont il va se fissurer. Plus le trajet de ces fissures est tortueux, moins les fluides s’écoulent facilement à travers, et donc plus il est étanche », explique Yann Monerie, chercheur au LMGC1.
Tortuosité
Pour déterminer cette tortuosité, il faut d’abord connaître les propriétés des différents composants du mélange, mais aussi savoir de quelle manière les granulats sont répartis dans le mortier. « Le béton n’est pas homogène et la distribution spatiale de ses différentes phases détermine sa fissuration », précise le spécialiste de micromécanique des matériaux qui collabore sur cette question avec l’Institut de radioprotection et de sureté nucléaire.
Car une fissure ne se propage pas au hasard, mais évolue de proche en proche d’un gravier à un autre. « Les interfaces entre les granulats et la matrice sont des zones faibles qui vont déterminer la propagation des fissures ». C’est cette trajectoire que les chercheurs et chercheuses veulent prédire pour mieux connaître les propriétés mécaniques de ce matériau.
De 4 mois à 3 secondes
Et pour réaliser ces prédictions, Yann Monerie et ses collaborateurs utilisent l’intelligence artificielle. « Nous avons mis au point un modèle qui permet la reconstitution statistique de la microstructure en trois dimensions à partir de coupes en deux dimensions », explique le chercheur.
Après avoir étudié des milliers de photos de coupe de béton et leur correspondance en 3D, l’IA leur permet ainsi de déduire à partir de simples images la taille et la forme des granulats ainsi que la façon dont ils sont répartis dans le ciment. Cette modélisation permet aux chercheurs d’établir une simulation numérique de propagation des fissures. « Sans le machine learning il faut environ 4 mois de calculs pour réaliser ces simulations, avec l’IA il faut 2 à 3 secondes ! »
Cette intelligence artificielle prédictive permet de prévoir la perméabilité d’une centrale à partir de simples plans de coupe des échantillons de béton. Et ces applications vont même au-delà du nucléaire : « avec cette méthode nous pouvons également connaître l’étanchéité des maisons qui sont construites sur un sol pollué par exemple », complète Yann Monerie.
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- LMGC (CNRS, UM)
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