Etudiants en liberté
Oublier ses études le temps d’une équipée en mer : un moment hors du monde pour 15 étudiants en situation de handicap de l’Université de Montpellier. Bienvenue à bord du Wayawaya. Toutes voiles dehors, la goélette a des airs de mouette rieuse, malgré les 22 mètres de sa robuste coque en acier.
Elle embarque dans des conditions idéales : du Sud, un petit thermique souffle son haleine d’été. Sous la coque, un nœud à peine de courant ligure : murmure venu d’Italie, pour rappeler que le Golfe de Gênes n’est pas loin. Une joie calme s’installe.
Première sortie en voilier
Parti du Grau du roi, le Wayawaya désigne de son étrave la colline de Sète : fantomatique et brumeuse au loin, sous le soleil éclatant. Pour beaucoup, c’est la toute première sortie en voilier. “On a l’impression d’être seuls au monde dès qu’on est loin des côtes”, commente Maxime, assis sur le pont. Mohamed a un soupir émerveillé : “la mer… un sentiment unique, décrit-il. C’est bon de sortir de la pression des études, de s’évader loin de la vie quotidienne”.
Maxime suit un DUT de chimie à Sète, Mohamed une licence d’informatique à la Faculté des sciences. Pour tous deux, le service Handiversité[1] s’est avéré d’une aide précieuse. “Pour réussir, il faut bosser, explique Mohamed : programmation, systèmes, bases de données… l’informatique est un univers complexe, qui gère tout notre quotidien”.
Le service Handiversité a mis à sa disposition un assistant pédagogique qui l’accompagne durant les TD et TP. Lors de l’examen, il est aussi là pour rédiger ce que lui dicte Mohamed. Cet assistant, c’est Tahar. “Une mission qui demande des compétences très pointues, explique ce docteur en optoélectronique. Difficile pour moi d’accompagner un étudiant en biologie, par exemple. Avec Mohamed, on se comprend. D’autant qu’on a travaillé ensemble toute l’année”.
Accompagnement au quotidien
A chacun son accompagnement, car chaque situation est différente. Pour Majid comme pour Yohan, le service Handiversité a permis de mettre en place un aménagement des examens. Tous deux bénéficient de temps supplémentaire durant les épreuves : une mesure proposée aux étudiants qui rencontrent des difficultés d’attention ou de concentration. “Il faut souvent que j’accélère en dernière partie de l’exam. Heureusement l’assistant pédagogique est là pour me dire : hola Yohan, reviens sur terre !” conclut Yohan en riant.
Affrété par l’association Voiles pour tous, le Wayawaya trace sa route dans une mer d’huile. Le bateau est aménagé pour accueillir tout le monde à bord : les passe-ponts notamment ont été élargis, pour laisser le passage aux fauteuils. Des aménagements plutôt rares, explique Christophe, le président de l’association. “Une offre de croisière adaptée, ça n’existe quasiment pas. Il y a des normes à terre, mais c’est beaucoup plus rare en mer. Très peu de bateaux sont accessibles aux personnes en situation de handicap !”.
Une fois par an, le service Handiversité de l’UM organise cette sortie pour les étudiants qu’il suit tout au long de l’année. L’idée : “se retrouver en-dehors du cadre de l’université, explique Isabelle, responsable à l’UM du suivi des étudiants. Il s’agit d’oublier un peu le quotidien, et permettre de se rencontrer, de créer du lien”.
Retour au Grau du Roi. Mais on repartira sur le Wayawaya ou sur une autre blanche mouette. Wayawaya ? Ça veut dire “Là-bas, là-bas” dans une lointaine langue d’Amérique latine. Ou encore “Mendiant céleste”, en bambara cette fois. Tout un programme…
[1] Le service Handiversité accueille et accompagne des étudiants en situation de handicap tout le long de leur parcours universitaire. Ses missions : permettre à chacun de poursuivre ses études dans les meilleures conditions, et l’accompagner dans l’élaboration de son projet universitaire et professionnel.