[LUM#4] Emballez écolo
Comment bannir l’omniprésent plastique de nos emballages alimentaires ? A Montpellier, les chercheurs planchent sur de nouveaux matériaux plus respectueux de la planète.
Des millions de tonnes de plastique flottent entre deux eaux dans l’océan Pacifique. Un vortex de déchets qui s’étend sur une superficie équivalente à 6 fois la France. Ce « septième continent » de plastique se dégrade lentement, avec des conséquences sur l’environnement encore mal connues. Et nous ne cessons de l’alimenter à chaque repas… « Les trois quarts des emballages alimentaires sont constitués de matériaux plastiques, explique Nathalie Gontard. Le plastique met 100 à 200 ans pour se dégrader alors que son utilisation massive n’a débuté qu’il y a 50 ans », précise la chercheuse au laboratoire Ingénierie des agropolymères et technologies émergentes.
Pour réduire notre empreinte sur la planète, elle planche sur la mise au point de nouveaux emballages plus écologiques. « Ces plastiques sont issus de la chimie du pétrole. Leur remplacement par des matériaux issus de ressources renouvelables et biodégradables en conditions naturelles constitue une avancée très attendue de la recherche », souligne Nathalie Gontard. Si les « bioplastiques » existent déjà, ils posent encore un problème majeur : ils sont fabriqués avec de l’amidon qui provient de ressources alimentaires : blé, maïs ou pomme de terre. « Affamer une moitié de la planète pour permettre à l’autre moitié de consommer écolo, ça n’aurait pas de sens », souligne la chercheuse.
Du déchet à l’emballage
Et si l’on imaginait des emballages issus non pas de ressources alimentaires mais… de nos déchets ? Un véritable défi. Car il faut répondre à des contraintes importantes : préserver le plus longtemps possible les qualités nutritionnelles et organoleptiques des aliments pour limiter leur perte après récolte. Mais aussi démontrer une innocuité totale pour le consommateur, et une absence d’impact sur l’environnement.
Dans le cadre du projet européen Ecobiocap coordonné par Nathalie Gontard, les chercheurs ont relevé le défi. Et mis au point une nouvelle génération d’emballages, à partir des résidus des industries agro-alimentaires. Ingrédients de cette recette révolutionnaire : un polymère issu de la fermentation de déchets liquides des industries laitières, et des fibres ligno-cellulosiques issues du broyage de paille de blé. En mélangeant le tout suivant un savant protocole et en l’assemblant grâce à des technologies innovantes, les chercheurs obtiennent un matériau qui ressemble comme un frère au plastique. En version totalement biodégradable.
Économie circulaire
La barquette ainsi réalisée est parfaitement adaptée à la conservation de fruits et légumes frais. « Il suffit de la jeter au compost avec le reste de vos déchets alimentaires », précise Nathalie Gontard. Une véritable révolution. Car cette innovation ouvre la voie à une forme d’économie circulaire qui fonctionnerait en boucle et ne génèrerait donc plus de déchets. « On crée un système durable qui respecte la planète, il faut penser à long terme », souligne la spécialiste.
Ces matériaux écologiques se heurtent désormais à un autre obstacle : s’imposer sur le marché de l’emballage en lieu et place des plastiques d’origine pétrochimique. « Il faut identifier les freins que l’on peut rencontrer, explique Nathalie Gontard. Pour cela nous avons développé un outil d’aide à la décision destiné aux acteurs de la filière ». Aujourd’hui seuls 1% des emballages sont biodégradables, « l’objectif c’est qu’on arrive à zéro emballage non biodégradable ».
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Emballer c’est innover
Mission première de l’emballage : protéger. « Il garantit la sécurité sanitaire des aliments. Son rôle est aussi de créer une atmosphère qui favorise la préservation des qualités gustatives et nutritionnelles », explique Nathalie Gontard. Une mission investie depuis quelques années par l’innovation technologique, avec l’arrivée des emballages « actifs » et « intelligents ».
- Les emballages actifs contribuent à ralentir la dégradation des aliments. Les absorbeurs d’oxygène par exemple sont couramment utilisés pour réduire les réactions d’oxydation des vitamines et des acides gras essentiels, prolongeant ainsi la vie de l’aliment et ses qualités nutritionnelles. Il existe également des emballages anti-microbiens, absorbeurs d’eau ou encore émetteurs de CO2 qui permettent eux aussi de préserver les aliments plus longtemps.
- Les emballages intelligents donnent eux des informations en temps réel sur l’état des aliments. Des étiquettes intelligentes permettent par exemple de détecter la présence de bactéries pathogènes. Elles indiquent si l’aliment est encore bon sans avoir besoin de se fier à une date limite de consommation souvent arbitraire qui pousse à jeter des produits encore consommables. Un parfait allié contre le gaspillage alimentaire.
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