MoXMo : Le multiculturalisme européen face aux défis du bassin de Thau

Une soixantaine d’étudiantes et étudiants de l’alliance européenne Charm-EU était dans l’Hérault du 15 au 26 avril dernier pour résoudre ensemble des défis environnementaux en lien direct avec le territoire. L’occasion de mettre en pratique leurs apprentissages dans un contexte multiculturel stimulant.

Vous avez dit MoXMo ? Derrière cet acronyme anglophone (Montpellier cross-thematic mobility) se cache un programme de mobilité étudiante Eramus + qui entre dans la catégorie des BIP pour blended intensive programme. Ils permettent à des jeunes inscrits dans des universités européennes de faire un court mais intensif séjour à l’étranger. Dans ce cas précis, l’événement s’est déroulé dans le cadre du master international « Défis globaux pour le développement durable », un diplôme conjoint à cinq universités membres de l’alliance Charm-EU (voir encadré), dont l’Université de Montpellier.

Nul doute que le dépaysement était assuré pour la soixantaine de jeunes européens venus d’universités situées en Espagne, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Hongrie et en France afin de participer à cette seconde édition du MoxMo, laquelle se déroulait du 15 au 26 avril dans l’Hérault. Moment clé de leur formation, dont la pédagogie est axée sur l’apprentissage par résolution de défis, ce programme express de mobilité étudiante leur a donné l’occasion de travailler par équipes internationales et interdisciplinaires sur des thématiques environnementales en phase avec les enjeux de notre territoire.

Sensibiliser à des problématiques concrètes

Cinq de ces défis avaient été construits en amont par l’équipe pédagogique du master européen en collaboration étroite avec le syndicat mixte du bassin de Thau (SMBT). « Nous profitons de la présence des étudiants du programme CHARM-EU, anglophones et issus de plusieurs pays d’Europe, pour qu’ils nous apportent une manière de réfléchir différente et des solutions auxquelles nous n’aurions pas pensé, explique Alexandre Pennaneac’h, en charge de piloter la Blue Thau Lab, la plateforme d’innovation collaborative territoriale du SMBT.

Il s’agissait pour ces étudiantes et étudiants en master de réfléchir à comment sensibiliser et impliquer la société civile comme le monde professionnel, aux problématiques concrètes de la lagune de Thau. Ainsi, il était question dans ces défis d’agriphotovoltaïsme appliqué à la conchyliculture, de l’utilisation d’IA pour l’analyse de l’eau dans l’étang de Thau, de parcours pédestre écoresponsable, d’actions subventionnées favorables à l’environnement à destination de l’agriculture et de l’élevage, de sécurité alimentaire…

© Superkut

Sixième et dernier défi : une réflexion sur le potentiel de développement de la plateforme de formation aquaponique de l’UM, située au sein de la Station méditerranéenne d’environnement littoral (SMEL) à Sète. L’aquaponie est une technique permettant de valoriser les eaux issues de l’aquaculture pour d’autres usages (maraîchage, plantes d’ornement), évitant ainsi les gaspillages et limitant les pollutions. « Les étudiants peuvent avoir une vision beaucoup plus globale que la nôtre, laquelle est souvent très technique », remarque Claude Amiel, chargé de mission UM au SMEL.

Du podcast à la cartographie interactive

C’est à Balaruc-les-Bains, sur les rives de l’étang de Thau,  que les étudiants et étudiants ont passés leur première semaine. Ils y ont rencontré des professionnelles et professionnels travaillant dans des domaines stratégiques du territoire : la pêche, la viticulture, l’élevage, l’agriculture, l’ostréiculture, le tourisme… Encadrés par des enseignantes et enseignants du master, les projets se sont construits en conditions réelles au sein d’équipes composées de jeunes qui se rencontraient parfois pour la première fois et qui, autre défi de taille, ne parlaient pas toujours français. L’association CPIE (Centre permanent d’initiatives pour l’environnement) bassin de Thau et les membres du SMBT ont également contribué à enrichir de leur expertise une réflexion holistique prenant en compte le rôle central de la protection de l’environnement et l’importance de la communication entre les différents acteurs du territoire.

La deuxième semaine, les jeunes européens ont rencontré des chercheurs et chercheuses d’Icireward, le centre Unesco sur l’eau, et visité différents sites de recherche tout en continuant à plancher sur leurs défis. « C’est une école de terrain : les étudiantes et étudiants se retrouvent à gérer des contraintes auxquelles ils ne sont pas confrontés dans leur salle de classe mais qui sont bien celles qu’ils auront demain dans leur vie professionnelle, détaille Valérie Borrell, enseignante-chercheuse en Sciences de l’eau à l’UM. Ils viennent se confronter à des problèmes pour lesquels les scientifiques n’ont pas forcément la solution. Ensemble, professeurs et étudiants mettent en place une méthodologie afin de trouver des éléments de solution. C’est un apprentissage plus concret et plus authentique. »

Cette aventure collective internationale s’est conclue par la présentation des travaux étudiants le vendredi 26 mai devant un jury à la fois pédagogique et professionnel. Les solutions proposées ont varié du podcast à la cartographie interactive en passant par un groupe WhatsApp ouvert aux habitants ou encore l’intégration dans le paysage de projets artistiques à des fins pédagogiques. Des travaux très appréciés par les membres du jury, notamment en raison de la qualité du travail fourni en à peine deux semaines sur un territoire qui était inconnu de la plupart de ces jeunes. Lesquels repartent avec l’impression d’avoir vécu une expérience collaborative unique. « Les professionnels avec lesquels nous avons travaillé nous ont impliqué dans tout le processus de réflexion. Ils ont fait confiance à nos idées et à nos méthodes, ce qui était vraiment super », affirment en cœur Ema et Nelli, l’une hongroise et l’autre finlandaise, actuellement étudiantes à Montpellier. Notre équipe était particulièrement multiculturelle, tous les membres de notre équipe venaient d’un pays différent. Cela a beaucoup contribué à enrichir notre travail commun. »

© Superkut

Un master sous le signe de l’Europe

L’alliance d’universités européennes Charm-EU a été initiée en 2019 dans le cadre de l’appel à projet Erasmus + des universités européennes. Elle réunissait ainsi cinq partenaires sous la coordination de l’Université de Barcelone dont : l’Université de Montpellier, l’Université d’Utrecht (Allemagne), le Trinity College de Dublin (Irlande), l’Université Eötvös Loránd de Budapest (Hongrie). Un master conjoint co-construit a été lancé par ces cinq universités en 2021.

Intitulé « Défis globaux pour le développement durable » (Global challenges for sustainability), ce cursus transdisciplinaire adossé à la recherche repose sur la résolution de défis de terrain en phase avec les problématiques de la société en travaillant sur trois thématiques phare : l’eau, l’alimentation et la santé. Inscrits de facto dans les cinq universités, les étudiants suivent le même enseignement au même moment, peu importe le campus sur lequel ils se trouvent, grâce à un enseignement hybride qui permet à l’équipe pédagogique de proposer l’expérience la plus internationale possible.

Depuis sa création, cinq universités européennes ont rejoint l’alliance Charm-EU : l’Université d’Åbo Akademi (Finlande), l’Université de Wurtzbourg (Allemagne), l’Université des sciences appliquées de la Rhuhr-West (Allemagne) et l’Université de Bergen (Norvège). Elles intégreront la nouvelle formule enrichie du master qui devrait voir le jour en septembre 2025 avec une quatrième et nouvelle thématique de formation : énergie et ville durable.