Plan égalité femme-homme : “Une véritable culture de l’égalité se met en place”
Le nouveau plan égalité femme-homme de l’Université de Montpellier a été voté à l’unanimité par le conseil d’administration le 13 mars dernier. Il prévoit le déploiement de trente nouvelles actions après les quarante déjà réalisées dans le précédent plan. Bilan et perspectives avec Agnès Fichard-Carroll, vice-présidente à la formation et à la vie universitaire et chargée de mission pour l’égalité femme-homme et Laure Parmentier, cheffe du service qualité de vie au travail à la direction vie des Campus (voir Rouages : « Œuvrer pour des causes fortes »).
Avant d’annoncer les grandes lignes du nouveau plan égalité femme/homme de l’Université de Montpellier quel bilan dressez-vous du plan 2021-2022 (lire : Pour une plus grande culture de l’égalité entre les femmes et les hommes) ?
AFC : Ce premier plan, car il s’agissait du premier, comportait sept axes et quarante actions. Toutes ont été réalisées – à l’exception d’une seule qui nous a semblé finalement peu judicieuse – le bilan est donc très positif, une véritable culture de l’égalité se met en place et nous devons continuer à la diffuser.
Quelles sont les actions phare qui ont pu être déployées pendant cette période ?
LP : Il y en a eu beaucoup à commencer par le déploiement d’une procédure de signalement de tout acte de violence, de discrimination, de harcèlement moral, sexuel, d’agissements sexistes, etc. Une cellule d’écoute a été créée et un guide qui s’adresse spécifiquement aux victimes et/ou aux témoins de violences sexuelles et sexistes (VSS) est désormais disponible sur le site de l’Université.
Cette cellule a-t-elle été sollicitée ?
AFC : Oui, nous avons eu une dizaine de signalements de VSS grâce à l’important travail de communication qui a été déployé et trois saisines de la section disciplinaires ont été réalisées. Mais ces signalements renvoient à des situations très variables, certaines ne relèvent pas de l’Université mais nous avons toutefois pu aider ces personnes dans leur démarche. D’autres personnes ont effectué des signalements sans souhaiter aller au-delà.
Comment pouvez-vous les aider dans ce cas ?
LP : Ces personnes souhaitaient simplement que les choses s’arrêtent. Je peux citer le cas de « blagues » sexistes qui ne sont donc pas des blagues mais bien des agissements sexistes. Le rôle de la cellule d’écoute a été de recadrer les auteurs, de les aider à comprendre pourquoi ce comportement n’a plus sa place dans l’établissement. Après soit la personne comprend, soit elle ne comprend pas, mais elle doit s’arrêter.
Cela concerne essentiellement les relations entre agents ?
LP : Sur ces dix situations, deux opposaient des membres du personnel, trois autres des enseignants-chercheurs et des étudiants, quatre concernaient uniquement des étudiants et étudiantes et enfin une dernière entre un étudiant et une personne extérieure. Il y a eu deux sanctions disciplinaires, un signalement au procureur, deux recadrages et un dossier est encore en cours.
Le programme Oser ! visant à aider les femmes à briser les plafonds de verre a été poursuivi. Il fonctionne bien ?
LP : Oser ! existait même avant le plan égalité femme-homme puisqu’il fête ses dix ans cette année. En tout, 140 femmes ont été formées au sein de l’université. Le programme concernait au départ les enseignantes-chercheuses et chercheuses, il s’est ouvert aux femmes Biats en situation d’encadrement il y a trois ans. Nous prévoyons maintenant de l’ouvrir aux doctorantes et/ou aux personnels Biats. De nouvelles animatrices ont été formées en interne : Séverine Boulon, qui est enseignante-chercheuse, et moi-même. Mais les objectifs de cette formation sont restés les mêmes : permettre aux femmes de mieux aborder leur carrière, d’avoir plus confiance, de créer un réseau, de savoir se valoriser et communiquer.
Un travail a également été mené avec la DRH ?
AFC : Oui nous avons travaillé conjointement sur la sécurisation du parcours des femmes enceintes avant et après leur congé maternité, nous avons mis fin à la proratisation de leurs primes. Nous proposons également un accompagnement pour les hommes qui partent ou reviennent de congé parental. Concernant les jurys de recrutement, nous avons réalisé une plaquette « Recruter sans discriminer » visant à promouvoir les bonnes pratiques de recrutement. … Il y a vraiment eu beaucoup de choses ! La mise en place d’une formation à l’égalité, des actions de sensibilisation pour les nouvelles arrivantes et nouveaux arrivants.
Et la réalisation d’un bilan parité qui a donc été présenté aux instances en même temps que le nouveau plan, c’est bien cela ?
AFC : Oui on peut d’ailleurs trouver ce bilan sur l‘intranet de l’Université. Les chiffres que nous y annonçons sont issus du rapport social unique (RSU) essentiellement. Ils mettent en perspective l’évolution de l’égalité entre femmes et hommes au sein de l’Université entre 2018 et 2021. Et c’est notamment à partir de ce bilan-là que nous avons dessiné les actions du nouveau plan égalité.
Alors parlons de ce nouveau plan. Il comporte six axes et non plus sept, pourquoi avoir retiré l’axe concernant les étudiants et étudiantes ?
LP : Cet axe n’a pas vraiment disparu, il est sorti du plan égalité parce qu’il se trouve maintenant dans le schéma directeur de la vie étudiante. On y retrouve toutes les actions qui concernent l’égalité et la lutte contre les discriminations au niveau étudiant.
Au travers de ces six axes 30 actions sont proposées. C’est un peu moins que le précédent ?
LP : Cela peut paraître moins, mais en réalité il y a des actions qui en comportent plusieurs et certaines d’entre elles sont assez ambitieuses en terme de temps, de charge de travail et de résultats espérés donc nos objectifs continuent à prendre de l’ampleur.
Quelles actions pouvez-vous d’ores et déjà nous annoncer ?
AFC : Une de nos actions phare sera la participation à l’enquête Acadiscri menée par un groupe de chercheurs dans plusieurs universités françaises. Elle sera lancée auprès de l’ensemble de la communauté universitaire et ne s’intéressera pas qu’à l’égalité entre femmes et hommes, mais à l’ensemble des 25 critères de discrimination définis par la loi : genre, âge, appartenance vraie ou supposée à une orientation sexuelle, apparence physique… L’objectif est d’avoir des indicateurs chiffrés pour évaluer la situation.
Le plan mentionne une plaquette sur la mixité. Quel sera son contenu ?
LP : Cette plaquette donnera le pourcentage et la réussite des filles dans les différentes filières. Certaines filières sont encore très genrées – cela a d’ailleurs été l’objet de l’exposition « Flou.e » proposée dans le cadre de « Donner des Elles à l’UM » – nous voulons montrer que les femmes qui s’inscrivent dans des filières réputées « masculines » réussissent et réussissent même très bien.
Il y a également un volet communication ?
LP : Oui, il faut continuer à former la communauté universitaire à la question des stéréotypes de genre, notamment les chargés de communication qui peuvent encore parfois les utiliser sans en avoir conscience. Pour les aider nous avons réalisé un guide d’écriture inclusive qui vient d’être diffusé à grande échelle. Et enfin une des actions importantes de ce plan sera la constitution d’une boîte à outils à destination des UFR, écoles, des instituts et des structures de recherche.
Qu’est-ce qu’on trouvera dans cette boîte à outils ?
LP : C’est encore en cours de réflexion mais on y trouvera des ressources « clés en main » pour mener des actions de sensibilisation : le plan égalité, les textes de loi, le bilan parité, peut-être la possibilité d’avoir accès à des livres ou des replays… Toujours sur la sensibilisation nous allons proposer des formations flash, une heure ou une demi-heure, sur les VSS et les dispositifs de signalement à destination des personnels. Quelque chose de très court qui permettra de toucher beaucoup de personnes.
Y’a-t-il des orientations qui changent depuis le dernier plan, des choses à ne pas refaire ?
AFC : Non, l’idée c’est de rester dans cette dynamique et de pérenniser nos actions. Le bilan parité par exemple sera reconduit régulièrement pour observer son évolution au sein de l’Université. Nous allons continuer les actions de sensibilisation, continuer à favoriser l’articulation entre activité professionnelle et vie personnelle comme nous l’avons fait en créant des berceaux de crèche. Nous allons continuer à favoriser l’égal accès des hommes et des femmes aux postes à responsabilité, poursuivre la lutte contre les discriminations et les actes de violence…
Globalement, comment est accueilli le déploiement de ces actions à l’Université ?
AFC : Toutes ces actions ont été votées à l’unanimité ! C’est une thématique centrale dans la société d’aujourd’hui et l’Université est le reflet de la société. C’est ici que sont formées les générations de demain et même si le plan pour l’égalité professionnelle ne vise pas prioritairement les étudiantes et les étudiants, il a un impact sur eux. Quand nous travaillons à ce que les femmes brisent les plafonds de verre, nous créons de nouveaux modèles identificatoires pour les étudiantes et pour les étudiants de notre Université.