Rouages : « Derrière un projet d’orientation il y a la question de l’identité »
Cheikh Latrache et Matthieu Evrard sont psychologues de l’Éducation nationale. Détachés par le rectorat au SCUIO-IP, ils conseillent, orientent et écoutent les étudiants et étudiantes de l’Université de Montpellier dans le choix de leur formation et dans leur insertion professionnelle. Ce mois-ci, dans le cadre de la série vidéo « Rouages » produite par l’UM, ils nous racontent leur métier.
Je vous parle d’un temps que les plus de 30 ans ne peuvent pas connaître, celui où on ne parle plus de conseillers d’orientation mais de psychologues de l’éducation nationale. Leur mission ? Contribuer à la réussite des étudiants et étudiantes en les accompagnant dans la construction de leur projet de formation et d’insertion professionnelle. « Avec plus de 26 000 formations juste après le bac et 11 500 métiers, ils sont nombreux à se sentir perdus ou démunis. Nous sommes là pour les guider et les accompagner dans cette complexité » explique Matthieu Evrard, qui occupe ce poste à l’UM depuis 3 ans après avoir exercé en France d’outre-mer.
Comme lui, ils sont quatre, employés par le rectorat mais détachés à mi-temps auprès du service commun d’information d’orientation et d’insertion professionnelle le SCUIO-IP. « On est un petit rouage d’un rouage plus grand qui est le SCUIO-IP et dans lequel on trouve plusieurs services » explique Cheikh Latrache, qui exerce depuis près de 20 ans à Montpellier. A côté du service orientation-information dans lequel travaillent ceux qu’on surnomme les « psy EN », on trouve un service dédié à l’accompagnement et à l’insertion professionnelle et un troisième chargé de mener les enquêtes sur l’insertion professionnelle des étudiants et étudiantes.
Plus de 700 étudiants et étudiantes par an
Direction la BU Science sur le campus Triolet où les deux professionnels reçoivent chaque année plus de 700 étudiants et étudiantes venus de la Faculté des sciences bien sûr mais aussi des différents IUT, de l’IAE, ou de Polytech et inscrits dans des niveaux allant de la L1 au master et parfois même au doctorat. « La moitié des étudiants viennent pour des demandes de réorientation, l’autre moitié pour construire un projet de poursuite d’études avec une finalité professionnelle » explique Cheikh Latrache.
Pour les guider au mieux, les psychologues de l’éducation nationale s’appuient sur la connaissance des filières et des métiers mais aussi sur la connaissance de soi. « Nous essayons de faire converger des centres d’intérêt, des qualités, des valeurs, des compétences avec un certain type de métier ou une filière. La dimension psychologique est centrale » détaille Matthieu Evrard, titulaire d’un master de psychologie. Une obligation pour prétendre au DECOP, le diplôme d’État de conseiller d’orientation-psychologue.
Une boîte à outils bien garnie
Outre les entretiens, ces psychologues conseillent également dans le cadre d’actions collectives organisées à la demande des composantes et des départements sur tous les sites de l’Université de Montpellier y compris les sites délocalisés de Béziers ou Nîmes. « L’objectif ici est que les étudiants, en formation initiale ou continue, commencent à construire par eux-mêmes une démarche de projets » poursuit Cheikh Latrache. Nous proposons aussi la certification C3R pour réussir, réagir, rebondir qui permet à des étudiants décrocheurs d’élaborer un projet futur et d’avoir des outils de communication écrite ou orale ».
Face à des étudiants et étudiantes tentés de voir les psychologues de l’éducation nationale comme des « magiciens capables de les guider d’un coup de baguette magique », ces derniers disposent d’une boîte à outils bien garnie : outils d’aide à l’orientation tels que les tests de personnalité ou les questionnaires ; références bien connues comme Onisep, le CIDJ ou l’IJBox ; espaces numériques de travail qui offrent aujourd’hui un accès au guide ressource emploi ; plateformes gouvernementales telles que trouvermonmaster.gouv.fr et bien sûr Parcoursup.
Un univers de contraintes
Des outils qui ont certes rendu plus simple l’accès à l’information sur la formation et l’orientation mais qui l’ont également profondément transformé : « Avec Parcoursup les jeunes ont une idée plus précise qu’à mon époque sur ce qui existe, explique Matthieu Evrard. En revanche il y a quelque chose d’un peu chronophage et anxiogène avec un nombre de vœux et un calendrier à respecter. » Une dimension anxiogène peut-être de plus en plus présente dans le métier des psychologues de l’éducation nationale.
« Nous intervenons pour aider les gens à un moment où ils sont en questionnement, en doute et c’est cet accompagnement qui me plait énormément, souligne Cheik Latrache. Cela suppose écoute, bienveillance et une capacité à accueillir la demande de l’autre. » « Derrière un projet d’orientation il y a la question de l’identité, de la place qu’on va occuper dans la société et donc les étudiants arrivent souvent avec un niveau de stress très conséquent. Notre métier vise aussi à réduire ce stress en donnant une marge de manœuvre dans un univers de contraintes » conclut Matthieu Evrard.