Transferts public-privé : l’UM pionnière sur la déontologie
Depuis le 9 mars dernier, l’UM est une des premières universités françaises à s’être dotée d’une commission consultative de déontologie. Une instance interne chargée de formuler des recommandations préparatoires pour l’autorisation de mobilité des chercheurs entre les laboratoires de recherche publics et le secteur privé.
C’est une conséquence de la loi PACTE de 2019 pour la croissance et la transformation des entreprises. Un de ses objectifs : simplifier le parcours des chercheurs souhaitant créer ou participer à la vie d’une entreprise afin de valoriser leurs recherches. Tout part d’un constat : depuis 2000, seuls 231 fonctionnaires chercheurs ont demandé une autorisation pour créer leur entreprise, soit moins de 0,01 % des personnes travaillant dans la recherche publique chaque année. Parallèlement, 0,8 % des chercheurs recrutés par les entreprises sont agents de la recherche publique.
« Ce constat est le fruit d’une rigidité affirmée des règles de droit français, antérieures à la loi PACTE, régissant les partenariats entre public et privé », souligne Marie-Christine Sordino, Vice-présidente et référente déontologue de l’UM. Un frein, selon les autorités, à l’innovation française et à la compétitivité des entreprises.
Des garanties strictes
Pour autant de tels transferts ne peuvent se faire sans garanties strictes permettant d’écarter tout soupçon de conflits d’intérêts entre des entreprises privées et des acteurs de la recherche publique. Au niveau national, si la commission de déontologie de la fonction publique était, jusqu’à présent, chargée d’assurer ce contrôle, cette fonction a été confiée le 1er février dernier à la Haute autorité de la transparence de la vie publique.
Concernant les laboratoires de recherche sous tutelle universitaire, c’est aux présidents d’université que revient la décision d’autoriser ou non de tels transferts. Philippe Augé, est ainsi un des premiers présidents à avoir doté son université d’une commission consultative de déontologie chargée d’étudier les demandes d’autorisations déposées par les chercheurs et de rendre un avis préparatoire à sa décision finale.
Cette commission, validée par le conseil d’administration du 9 mars dernier, est présidée par François Pierrot, Vice-président délégué à la valorisation et aux partenariats industriels. A ses côtés se trouvent également : Jacques Mercier, Vice-président en charge de la recherche, Marie-Christine Sordino, Vice-présidente et référente déontologue de l’UM, Bénédicte Luporsi, Directrice des ressources humaines et enfin Gaëtan Lan Sun Luk, Directeur de l’innovation et des partenariats.
Du public au privé ?
Pour un chercheur exerçant dans le public, trois cas de figure peuvent l’amener à demander à son employeur une autorisation pour apporter son expertise, percevoir une rémunération complémentaire voire prendre une participation au capital social dans le secteur privé.
Première situation : il souhaite créer sa propre entreprise à partir d’une innovation (brevet, logiciel, savoir-faire etc.) qu’il a développé au sein du laboratoire auquel il est rattaché et en devenir le président ou un des associés dirigeants. « Le brevet déposé appartient à l’université, explique Bénédicte Labat, chargée de valorisation à la Direction de l’innovation et des partenariats. Si le transfert de technologie est autorisé par le président, l’université établit un contrat de licence qui permet à l’entreprise d’exploiter le brevet contre le paiement d’une redevance. »
Deuxième cas de figure : la demande de concours scientifique. Le chercheur ne souhaite pas créer lui-même son entreprise, mais une société est intéressée pour développer son innovation et souhaite bénéficier de son expertise. Là encore, la commission consultative de déontologie est sollicitée pour garantir que les conditions sont remplies notamment l’absence de conflit d’intérêt. « Plusieurs articles du Code de la recherche fixent les exigences spécifiques dans ce type de cas. Le chercheur ne doit pas, par exemple, avoir pris une participation au capital social de l’entreprise dans les trois ans précédant sa demande » détaille Bénédicte Labat. Le chercheur pourra alors consacrer jusqu’à 50 % de son temps de travail à l’entreprise, en parallèle de ses travaux de recherche en laboratoire.
Troisième et dernière possibilité, « moins fréquente » selon Bénédicte Labat : le chercheur souhaite siéger dans un des organes de direction d’une société commerciale. La commission consultative est là encore sollicitée pour formuler un avis auprès du président dans la mesure où le chercheur pourra recevoir une rémunération de la part de l’entreprise.
Neuf avis formulés
Depuis sa création en mars dernier, la commission consultative de déontologie a déjà pu se réunir deux fois et formuler neuf avis. Parmi les sociétés concernées Diag2Tec experte dans les cancers hématologiques et dans la validation précoce des nouvelles molécules thérapeutiques. Néocean, spécialiste de l’ingénierie et de l’innovation nautique, Sterlab, spécialiste de la recherche biomédicale et des prestations de service dans le secteur de la microbiologie ou encore Acusurgical qui travaille sur la robotique chirurgicale de précision.
Une nouvelle réunion de la commission se tiendra en juillet prochain. « Nous avons beaucoup de demandes de la part des chercheurs pour des concours scientifiques et il est indispensable que l’autorisation du Président soit délivrée avant que le chercheur ne prenne une participation au capital social de l’entreprise. »
L’UM co-organise la journée du Réseau C.U.R.I.E
Le 1er juillet, l’UM (la Direction de l’innovation et des partenariats) co-animera, dans le cadre du réseau national C.U.R.I.E, une matinée de réflexion autour de la loi PACTE, de la mobilité des chercheurs et de la mise en place des commissions consultatives de déontologie. Fondé il y a 29 ans, le réseau C.U.R.I.E est au cœur de l’écosystème public-privé. Il vise à promouvoir et à accompagner la valorisation de la recherche via le transfert de technologies issu de la recherche publique vers le monde socio-économique. Ses 190 membres sont pour la plupart des institutions de recherche publiques telles que les universités, les CHU, les organismes nationaux de recherches, les écoles ou encore les structures issues du plan d’investissement d’avenir telles que les Sociétés d’accélération du transfert de technologies (SATT), les Instituts de recherche technologique (IRT) et les Instituts hospitalo-universitaires (IHU).