A web ouvert
Outil vital de notre quotidien, internet reste largement inaccessible aux malvoyants. Pour faire tomber les frontières, Yoann Bonavero fait appel à l’intelligence artificielle. Aider les personnes malvoyantes à accéder à Internet : c’est l’objet de la thèse de Yoann Bonavero, soutenue en novembre 2015.
Une idée lumineuse, qui répond à un énorme besoin. En France, où une personne sur 100 souffre d’une déficience visuelle, moins de 4% des sites des administrations seraient accessibles aux malvoyants. Des besoins qui ne se réduisent pas à l’Hexagone : dans le monde entier, plus de 246 millions de personnes souffrent de troubles de la vision.
Vitale toile
Ces personnes ont aujourd’hui les plus grandes difficultés à accéder aux contenus proposés sur la toile. Or l’internet est en train de devenir incontournable, souligne Yoann Bonavero : “l’accès aux services passe de plus en plus par le web. La toile est donc devenue vitale, notamment pour les personnes vieillissantes, pour qui il est difficile de se déplacer dans les administrations”.
Yoann est lui-même atteint d’une déficience visuelle. “Ma vue baisse, et j’ai de plus en plus de difficultés à accéder aux pages web correctement”. Certes, poursuit-il, “il existe des outils permettant l’adaptation d’un poste de travail. Mais la plupart d’entre eux s’adressent à des cas très généraux, et sont impossibles à paramétrer en fonction de besoins précis”.
Identifier l’info utile
Or, il existe “autant de types de malvoyance que d’individus, explique Yoann : les pathologies sont multiples, les évolutions et les stratégies d’adaptation différentes”. En 2011, au cours d’un master informatique suivi à l’Université de Montpellier, Yoann propose un projet de thèse original. Il imagine une solution faisant appel à l’intelligence artificielle : une interface informatique capable de s’adapter aux spécificités de chaque handicap visuel.
L’enjeu : aider chaque utilisateur à identifier, sur n’importe quelle page web, le contenu qui lui est utile. Un véritable casse-tête… D’autant que le Web n’y met pas du sien. La prolifération de l’information n’y est qu’un moindre obstacle. Il y a plus grave… Loin de prendre en compte les critères d’accessibilité, la plupart des sites ont en effet tendance à compliquer de plus en plus l’accès au contenu…
“L’information est volontairement noyée au sein de nombreux éléments parasites, explique Yoann Bonavero : popups publicitaires, liens commerciaux, informations redondantes, liens sponsorisés… Avec un peu d’habitude, une personne valide s’y retrouve. Pour un malvoyant, l’info utile a tendance à se transformer en aiguille dans une botte de foin !”
Outil personnalisé
Sa thèse dûment achevée, Yoann est pourtant tout proche de la solution. “L’outil utilise des algorithmes d’optimisation intégrant les souhaits de personnalisation de l’utilisateur : taille des polices de caractère, niveau de contraste, utilisation des couleurs et des niveaux de gris… Il permet aussi d’identifier le menu, le contexte de navigation…”
Le projet a d’ores et déjà fait la démonstration de sa faisabilité au cours de tests. Pour le poursuivre, Yoann Bonavero a signé un contrat d’un an avec le Laboratoire d’Informatique, de Robotique et de Microélectronique de Montpellier (Lirmm). Avec en ligne de mire un objectif : développer et généraliser une interface qui pourrait changer la vie de millions d’internautes.