[LUM#19] Décrocher du lithium
Légères, autonomes, durables, propres et made in Europe. Les axes de recherche sont nombreux dans le secteur très couru des batteries qui représente un point névralgique de la transition écologique. Les recherches menées à l’Institut Charles Gerhardt de Montpellier1 positionnent le laboratoire en bonne place dans cette course aux batteries.
Quel est le point commun entre un téléphone, une voiture, un lecteur MP3, un vélo ? Tous ces objets devenus incontournables, et bien d’autres, fonctionnent sur batterie. Et cette indispensable énergie contenue dans ces petites boites noires, c’est avant tout de la chimie. « Dans une batterie il y a une électrode positive et une électrode négative entre lesquelles circulent des ions. Ce sont les électrons liés à ces échanges ioniques qui fournissent l’énergie », explique Laure Monconduit.
Et l’ion en question, c’est le plus communément du lithium. « Petit, mobile et léger, c’est l’élément idéal pour cet usage », précise la responsable de l’équipe Batteries à l’ICGM. La batterie lithium-ion a représenté une véritable révolution, au point que ses concepteurs ont été récompensés par le prix Nobel de chimie 2019. Mais la révolution se heurte aujourd’hui à un enjeu majeur : le défi des matériaux. Car certains pointent déjà la pénurie de lithium qui pourrait menacer dans quelques décennies.
Recyclage
Comment s’affranchir de la dépendance au lithium dans le secteur des batteries ? « À l’ICGM plusieurs chercheurs allient leurs compétences pour faire avancer le recyclage des batteries. Ce procédé permet non seulement de diminuer les besoins en permettant de récupérer et réutiliser ces métaux, mais aussi de réduire la pollution importante engendrée par ces éléments dont l’extraction très énergivore et très gourmande en eau représente une catastrophe environnementale et humanitaire », explique la chercheuse.
Si le cercle vertueux du recyclage est « faisable », la chercheuse et son équipe travaillent aussi sur d’autres pistes pour faire évoluer les batteries. « Une des questions en jeu est de savoir si l’on peut remplacer le lithium par d’autres ions. D’autres éléments, voisins du lithium dans le tableau périodique, ont des propriétés proches et peuvent remplacer le lithium, sans trop dégrader les performances. » Au rang des candidats potentiels : le potassium, le magnésium, le calcium. Mais surtout le sodium, un élément mille fois plus abondant que le lithium dans la croute terrestre. « Notre équipe a d’ailleurs participé aux recherches pour élaborer les premières batteries sodium-ion qui sont désormais presque en production », précise Laure Monconduit.
Autonomie énergétique
Un enjeu qui dépasse le défi technologique, à l’heure où l’on se préoccupe d’autonomie énergétique. Car si la récente découverte d’un gisement de lithium dans le Massif central laisse entrevoir un futur approvisionnement local, l’essentiel de ce minerai provient encore des principaux pays producteurs que sont l’Australie, le Chili, la Chine et l’Argentine. « Au-delà de cette question des matériaux, nous sommes complètement dépendants de l’Asie qui a un quasi-monopole sur la fabrication des batteries. Nous n’avons que très peu de batteries made in France ou même made in Europe alors que nous sommes à la pointe en termes de recherche », regrette Laure Monconduit.
Une véritable course aux batteries est lancée dans le monde entier et ces recherches sont particulièrement stratégiques dans le contexte de transition énergétique, « car il s’agit désormais de stocker de l’énergie de manière propre, sans recours aux combustibles fossiles, ce qui participera à la lutte contre le réchauffement climatique, en parallèle d’une prise de conscience collective et surtout politique », conclut la chercheuse.
- ICGM (CNRS, UM, ENSCM)
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