[LUM#2] Faut-il avoir peur du moustique-tigre ?
Des épidémies de chikungunya et de dengue en France, vraiment ? Si le réchauffement climatique s’accompagne bien de risques sanitaires, dans nos contrées une telle menace ne serait pas d’actualité.
Il a peut-être été votre plus fidèle compagnon cet été, avec son vrombissement familier et son appétit pour les accolades. Son petit nom fait frémir : moustique-tigre, Aedes albopictus pour les intimes. Arrivé dans le Sud de la France il y a une dizaine d’années, il a aujourd’hui étendu son terrain de jeu jusqu’à la capitale. La faute au réchauffement climatique ? « Certainement pas uniquement », répond Jean-François Guégan du laboratoire Maladies infectieuses et vecteurs : écologie, génétique, évolution et contrôle.
« L’arrivée du moustique-tigre en France n’a rien à voir avec le climat », affirme le chercheur. En cause, « la densification des transports maritimes et aériens au niveau mondial qui a permis son arrivée jusqu’en Europe ». Et notamment le commerce des pneus usagés, un véhicule de premier choix pour les larves d’Aedes albopictus. « Sans l’intervention des transports le moustique-tigre n’aurait pas pu faire un bond de Lyon à Paris en un an », souligne le spécialiste. Qui n’innocente pas totalement les changements climatiques : « que l‘insecte puisse s’installer dans des régions rendues plus propices par une augmentation des températures est en revanche indéniable », précise Jean-François Guégan.
Pas de scénario catastrophe en vue
Problème : le moustique-tigre adulte peut emporter dans ses bagages certains virus, notamment responsables de la dengue ou du chikungunya. Les quelques cas récents de ces maladies dans le Sud de la France auraient-ils de quoi nous alarmer ? « La présence du moustique-tigre n’est pas synonyme de l’apparition d’une épidémie de dengue ou de chikungunya. Pour cela il faudrait que le cycle de ces virus puisse s’installer ici », rassure Jean-François Guégan. Ce qui nécessite des conditions favorables au développement du moustique, à celui du virus, et à sa transmission à l’homme.
Si le réchauffement climatique est un facteur favorisant, ce n’est pas le seul déterminant. « Les politiques de prévention, la situation économique des pays concernés, la modification des habitats naturels, la vulnérabilité et l’exposition des individus et des populations sont autant de facteurs qui entrent en jeu », précise Jean-François Guégan. Le moustique-tigre continuera probablement à mettre un peu de piquant dans vos soirées d’été, mais les cas de dengue et de chikungunya devraient, eux, rester isolés ou être vite circonscrits. Ouf, on a eu chaud.
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Coquillages et crustacés
Beaucoup plus discrète que les cas de dengue et de chikungunya, une augmentation des cas de gastro-entérites et d’infections a été constatée ces derniers étés en Vendée, Charente-Maritime et Gironde. Responsable : Vibrio vulnificus. « Une bactérie qui prolifère grâce à la hausse des températures des eaux côtières », explique Jean-François Guégan. Cette dernière se concentre dans les coquillages et peut ainsi être transmise à l’homme. « Une conséquence directe du réchauffement climatique sur la santé humaine », souligne le chercheur.
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