Mieux comprendre le passage de la douleur aigue à la douleur chronique
Des chercheurs de l’Institut des neurosciences de Montpellier (Université de Montpellier/Inserm) montrent le rôle prépondérant du récepteur FLT3, dans la chronicisation de la douleur post-chirurgicale. En inhibant ce récepteur grâce à des anticorps thérapeutiques, les scientifiques pourraient proposer des pistes prometteuses pour la prévention des douleurs chroniques. Leurs résultats sont à paraître dans la revue Progress in neurobiology.
Les douleurs chroniques sont des douleurs importantes qui persistent au-delà de trois mois. Environ 30% des patients ayant subi une chirurgie vont développer ce type de douleurs consécutivement à cette opération. Dans cette étude dirigée par Cyril Rivat, enseignant-chercheur à l’Université de Montpellier, les scientifiques mettent en lumière des mécanismes permettant de mieux comprendre l’apparition de ces douleurs chroniques post-opératoires et proposent des pistes pour les atténuer.
D’après les résultats de ces travaux réalisés sur un modèle animal, l’exposition répétée à une douleur (répétition d’une même chirurgie à une semaine d’intervalle), créé une vulnérabilité à long-terme qui se traduit par une augmentation de la sensibilité à la douleur et la survenue de pathologies anxiodépressives. Le récepteur FLT3 exprimé par certains neurones dits sensitifs joue un rôle clé dans ce phénomène. Concrètement, l’acte chirurgical induit l’activation du récepteur FLT3 des fibres nerveuses touchées ce qui entraine non seulement une augmentation de la douleur initiale mais également sa chronicisation.
Des anticorps dirigés contre FLT3
En collaboration avec l’Institut de recherche sur le cancer de Montpellier et la société Biodol Therapeutics, des anticorps thérapeutiques dirigés contre le récepteur FLT3 ont été générés. Ces anticorps inhibent l’activation de FLT3 ce qui réduit considérablement l’intensité des douleurs et stoppe la transition vers les douleurs chroniques. Le principe est simple, contrairement à la morphine ou à tout autre type d’antidouleur, ces anticorps ne pénètrent pas dans le cerveau, mais ciblent les nerfs lésés au niveau du système nerveux périphérique. FLT3 se positionne donc comme une cible prometteuse non seulement pour la prise en charge de la douleur post-opératoire mais également dans la prévention de sa chronicisation.
« Ces résultats sont encore préliminaires mais s’ils étaient confirmés ils pourraient venir en aide à de nombreux patients victimes de douleurs chroniques, a fortiori quand on sait qu’environ 300 millions de chirurgies sont réalisées chaque année à travers le monde », précise Cyril Rivat.
Informations pratiques :
« Activation of neuronal FLT3 promotes exaggerated sensorial and emotional pain-related behaviors facilitating the transition from acute to chronic pain » est déjà disponible intégralement dans sa version anglaise, et paraitra dans la revue scientifique « Progress in Neurobiology », volume 222 en mars 2023, 102405.
Auteurs : Adrien Tassou, Maxime Thouaye, Damien Gilabert, Antoine Jouvenel, Jean-Philippe Leyris, Corinne Sonrier, Lucie Diouloufet, Ilana Mechaly, Sylvie Mallié, Juliette Bertin, Myriam Chentouf, Madeline Neiveyans, Martine Pugnière, Pierre Martineau, Bruno Robert, Xavier Capdevila, Jean Valmier, Cyril Rivat.
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